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J’ai envie de préciser quelque chose ; je ne me retrouve pas dans le débat pour ou contre la médication. Somnifères, antidépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, stabilisateurs de l’humeur. Il se trouve que ces médicaments sont bien là. Et, qu’on soit professionnels, usagers ou entourage/famille , tout ce monde là est confronté à la question de la médication.

Depuis une quinzaine d’années, je ne prends plus de médicaments psychotropes.

J’ai arrêté la médication dans un contexte où il était impensable que je le fasse. Ni ma famille, ni les professionnels pouvaient imaginer que ça soit possible. Ils étaient convaincus que les médicaments étaient le seul traitement indiqué et indispensable pour moi. On a essayé de m’expliquer que, pour mon bien-être, je devais accepter le fait que je suis malade, et que je devrais prendre ces médicaments pour le reste de ma vie.

Je n’ai pas réussi à comprendre dans quelle mesure accepter le diagnostic et le traitement pouvait me mener à un mieux-être. Tout ça était extrêmement déprimant. Je vivais la médication comme un empoisonnement.

J’ai donc arrêté les médicaments. Ce fut un long chemin de recherche, d’apprentissages et d’erreurs, et beaucoup d’errance. Pendant des années, j’ai dû m’isoler lors des moments de crise, me cacher. J’avais trop peur de me retrouver à l’hôpital et médiquée, comme c’était arrivé si souvent. J’ai dû mentir aux soignants, puis finalement me passer de leur aide.

A partir de là, j’ai eu besoin d’apprendre comment vivre avec des choses qui font handicap, avec des symptômes, des fantômes, des démons, ou plus simplement, avec la folie. Je suis toujours en train d’apprendre comment vivre avec tout cela.

Mais... les effets des médicaments psychotropes varient très fort d’une personne à l’autre, et selon la dose.

C’est grâce aux témoignages d’autres personnes psychiatrisées que j’ai acquis un regard plus large sur la médication. Ils et elles sont nombreuses à me dire des choses comme :

  • je ne pourrais pas vivre sans mes médicaments
  • je vais beaucoup mieux depuis que je suis stabilisé
  • j’ai mis du temps à les accepter, mais maintenant je vais mieux
  • c’est grâce aux médicaments que j’ai pu faire des études

etc.

Ces vécus sont en fait plus faciles à défendre que le mien. La raison, c’est que ces vécus-là vont dans le sens de toutes celles et ceux qui ont un avantage à ce que les patients prennent leur médication :

  • les familles, pour que la personne soit plus supportable ;
  • les soignants, pour que l’unité de psychiatrie soit gérable ;
  • les dirigeants politiques, pour éviter ce qui fait désordre ;
  • les firmes pharmaceutiques et leurs actionnaires, pour les revenus générés par la vente de médicaments

Les personnes qui sont d’accord avec le traitement prescrit ne doivent pas se défendre.

Par contre, celles et ceux qui questionnent la médication, qui veulent la diminuer ou l’arrêter, doivent faire face à beaucoup de peurs !

La médication comme seule option

Je ne peux accepter que la médication soit la seule option pour les personnes comme moi.

Longtemps, j’ai ressenti la psychiatrie comme une menace importante. L’hôpital était synonyme pour moi de maltraitance. J’avais peur de me faire attraper et médiquer de force, attacher, humilier, déposséder.

En effet, c’était soit prendre le médicament, soit ne plus avoir droit aux consultations – pour motif de refus de soins.

Or, je n’étais pas du tout en refus de soins ! Je refusais de prendre des médicaments que je ne supportais pas, et je voulais faire autrement, sans savoir comment le faire.

Je cherchais également pourquoi les médecins refusaient de me suivre comme patiente si je ne prenais pas les médicaments. Devaient -ils se protéger d’une éventuelle responsabilité légale ?

Refuser de prendre le risque avec quelqu’un c’est légitime. Mais il est incorrect de prétendre que le refus est seulement du côté du patient. Il est aussi du côté du médecin qui ne veut plus suivre ce patient, ainsi que dans les lieux d’accueil et de soins qui imposent la prise d’une médication.

J’ai mis du temps à comprendre qu’en réalité, les soignants n’avaient pas non plus de choix dans cette situation. Car pour pouvoir choisir, il faut des alternatives.

Finalement, tout le monde se retrouve captif de cette médication lorsqu’elle est envisagée comme la seule option.

Choix et alternatives

En Belgique, rares sont les alternatives aux soins donnés en psychiatrie et en psychologie.

Il n’y a pas d’unités de soins sans médication.

Il n’y a pratiquement pas de lieux de répits autres que l’unité d’hôpital.

En Norvège, une loi votée en 2015 défend le droit des patients d’avoir un accès aux soins sans médication.

Cette loi a été créée suite aux actions groupées d’associations de patients, de familles et de soignants.

Aujourd’hui chaque hôpital psychiatrique norvégien doit disposer d’un nombre de lits pour les personnes qui désirent diminuer leur médication, ou recevoir des soins sans médication. La présence de ces drug free units −comme on les appelle− permet d’envisager d’autres options de traitement.

Ici en Belgique, je vois souvent les familles/proches se révolter contre les soignants, les soignants se révolter contre les patients et les patients contre leurs familles. Il y a un manque évident de dialogue et d’échanges. Je suis persuadée que les professionnels auraient beaucoup à apprendre s’ils voulaient écouter les usagers et usagères, et prendre en compte le rôle des proches.

En revenant à ma situation vécue, ce qui m’aurait aidé

Le diagnostic et le traitement m’ont été imposés. J’ai reçu très peu d’information, le moins possible. Mon avis n’était pas entendu. Mon devoir de patiente était de tout accepter et aller mieux.

J’ai vécu cela comme une dépossession de moi-même, et de mes moyens, comme si le médicament allaient faire les choses à ma place, alors que je demandais à prendre part.

A mon avis, pour permettre à une personne de s’impliquer dans sa médication, il faudrait respecter les droits du patient, et donc entre autres :

  • L’informer régulièrement, non pas une seule fois, mais au fur et à mesure, et à répétition. L’idée est de construire un échange qui permette de parler de l’action du médicament, de ses effets souhaités et de ses effets indésirables et des risques à long terme ; par exemple l’effet de tolérance, les dyskinésies tardives.
  • Se questionner sur sa médication peut être une occasion pour la personne d’explorer ses ressentis et de construire du lien. Avec elle-même et avec son entourage. La notice est pourtant un moyen d’information. Je suis étonnée du peu de personnes qui la lisent. Ne serait-ce pas utile qu’elle soit lue en présence du patient ?
  • Ce serait une bonne chose que le sevrage reste à l’esprit des médecins dès la première prescription. Qu’il parle avec le patient du sevrage ou d’une diminution de la dose dès que c’est possible. Beaucoup de personnes sont médiquées pendant trop longtemps, quand elles ne sont pas tout simplement surmédiquées.
  • Ne pas alimenter la peur. Au lieu de parler de rechutes, ou d’évoquer une potentielle ré-hospitalisation, il serait utile de se concentrer sur ce qui est nouveau, ce qui est différent dans le vécu du patient. Cela peut être un tout petit changement. La notion de rechute nourrit l’idée de chronicité, l’image d’une boucle sans fin, très déprimante et pas forcément juste. Ce n’est pas la seule manière de regarder les choses.
  • Plutôt que de se tenir à des protocoles universels, considérer chaque patient pour ce qu’il est ; un individu unique.
  • Pour cela il faut pouvoir consacrer du temps et de la disponibilité à chacune de ces personne, afin de pouvoir parvenir à une médication sélective et adaptée.
  • Les symptômes sont porteurs de sens. Vouloir simplement les faire disparaître ne résout pas grand-chose.

Je ne pense pas pouvoir donner une conclusion. Ma conclusion, c’est parlons-en.

Je vous remercie pour votre écoute.

[1En plaçant le texte de la note entre crochets.

[23En indiquant le numéro de la note entre les symboles « < » et « > ».

[*En plaçant une astérisque entre les symboles « < » et « > ».

En n’indiquant rien entre les symboles < et >.

[RabFrançois Rabelais.